Par CLAIRE HERARD
FINANCES

Le budget fédéral déposé le 16 avril a introduit de nouvelles dispositions pour le calcul de l’impôt sur le gain en capital.

Pour beaucoup de contribuables, elles s’apparentent à une devinette enrobée de mystère à l’intérieur d’une énigme, comme l’aurait dit Churchill.

Reprenons le problème depuis le début dans une conversation fictive avec la planificatrice financière et fiscaliste Josée Jeffrey, du cabinet Focus retraite & fiscalité.

PHOTO FOURNIE PAR JOSÉE JEFFREY

La planificatrice financière et fiscaliste Josée
Jeffrey, du cabinet Focus retraite & fiscalit

— C’est quoi, un gain en capital ?

Un gain en capital est la différence entre le prix auquel vous achetez un actif et le prix auquel vous le vendez. Si le prix de vente est plus élevé que le prix d’achat, vous réalisez un gain en capital.

— Je prévois vendre mon chalet 450 000 $. Est-ce que j’ai un gain en capital de 450 000 $ ? Il a été acheté 100 000 $ il y a 12 ans, il a bénéficié de 40 000 $ de travaux d’amélioration, et j’ai payé 10 000 $ en frais de courtage immobilier lors de la vente.

Plusieurs frais viendront augmenter votre coût d’achat. On pense entre autres aux droits de mutation, aux frais notariés, aux frais d’inspection en bâtiment. Certaines dépenses engagées pour des travaux importants pendant vos années de détention s’ajoutent aussi au prix de base. Tous ces frais feront partie du coût de votre chalet.

Dans votre cas, en ajoutant la somme de 40 000 $ payée pour des travaux d’amélioration, votre prix de base rajusté sera de 140 000 $ (100 000 $ plus 40 000 $). Tous les frais relatifs à la vente, tels vos frais de courtage immobilier de 10 000 $, viendront réduire le gain en capital. Récapitulons :

Prix de vente : 450 000 $

Moins le coût d’achat rajusté : 140 000 $

Moins les dépenses pour la vente : 10 000 $

Gain en capital : 300 000 $

— Bon, je réaliserais donc un gain en capital de 300 000 $ après la vente de mon chalet de 450 000 $. À l’heure actuelle (avant que les nouvelles mesures du budget fédéral entrent en vigueur), est-ce que je dois payer des impôts sur 300 000 $ ?

Rassurez-vous ! Vous ne paierez pas d’impôt sur la totalité du gain en capital de 300 000 $. À l’heure actuelle, le calcul est assez simple. Seule la moitié du gain en capital (50 %) est imposable, soit 150 000 $.

— D’accord, le taux d’inclusion est de 50 %, ce qui veut dire que seulement 150 000 $ de mon gain en capital de 300 000 $ est imposable. Mais imposable comment ?

La portion imposable du gain en capital est ajoutée aux revenus du contribuable dans l’année de la disposition du bien.

Dans la déclaration de revenus fédérale, le gain (ou la perte) en capital est calculé dans l’annexe 3. Le gain en capital imposable, donc après le taux d’inclusion de 50 %, est reporté à la ligne 12 700 de la déclaration de revenus.

Il s’additionne à vos autres revenus – revenu d’emploi, prestations du RRQ, pension de la Sécurité de la vieillesse, etc. – pour constituer votre revenu total.

— Donc, si je gagne un salaire de 100 000 $ dans l’année, j’y additionne mon gain en capital imposable de 150 000 $, pour un revenu total de 250 000 $ ?

Exactement, en supposant que vous n’ayez pas d’autres revenus dans l’année. Diverses déductions seront appliquées – pour votre cotisation au REER ou vos frais de garde d’enfants, par exemple – pour déterminer le revenu imposable sur lequel l’impôt sera calculé.

— Sur quels autres types de biens ou d’investissements est-ce que je dois payer un impôt sur le gain en capital ?

Vous devez payer l’impôt sur le gain en capital pour des actifs qui s’apprécient avec le temps, comme des actions, des obligations ou des biens immobiliers – un duplex locatif, par exemple. Mais pas sur la résidence principale : elle est exemptée de l’impôt sur le gain en capital.

— Est-ce que l’impôt sur le gain en capital est exigible aussi dans la déclaration de revenus provinciale ?

La réponse est courte : oui.

— Le budget fédéral déposé le 16 avril a modifié l’imposition du gain en capital. Qu’est-ce qui va changer ?

À compter du 25 juin, le taux d’inclusion de l’impôt sur les gains en capital réalisés par les particuliers devrait passer de 50 % à 66,67 %, mais seulement sur la tranche dépassant 250 000 $.

— Mon gain en capital de 300 000 $ sur mon chalet est supérieur au seuil de 250 000 $. Si je le vends après le 25 juin, est-ce que ça signifie que je devrai inclure 66,67 % de 300 000 $ dans mes revenus de 2024 ?

Non, seulement sur la tranche du gain en capital qui dépasse 250 000 $. Ainsi, le taux d’inclusion de votre gain en capital sera de 50 % sur la première tranche de 250 000 $. Le nouveau taux d’inclusion de 66,67 % s’appliquera sur l’excédent de 50 000 $.

Est-ce que le gouvernement du Québec a lui aussi modifié ses règles d’imposition sur le gain en capital ?

Québec a annoncé qu’il s’harmonisera avec le fédéral en faisant lui aussi passer de 50 % à 66,67 % le taux d’inclusion sur les gains en capital supérieurs, annuellement, à 250 000 $. Cette mesure s’appliquera elle aussi à partir du 25 juin.

— Devrais-je m’empresser de vendre mon chalet avant le 25 juin ? Quelle différence est-ce que ça ferait ?

Nous allons tenir compte des impôts fédéral et du Québec. Pour simplifier, nous supposerons que vous aurez en 2024 un revenu imposable de 100 000 $, auquel s’ajoutera le gain en capital imposable de 150 000 $.

Si vous vendez votre chalet avant le 25 juin, vous paierez en 2024 des impôts fédéral et provincial de 98 725 $ sur l’ensemble de vos revenus, selon un taux d’imposition effectif de 39,49 % (c’est le taux moyen sur l’ensemble des revenus imposables quand ils totalisent 250 000 $ à 300 000 $).

Si vous le vendez après le 25 juin, votre ponction fiscale sera de 102 016 $.

Un supplément de 3291 $.

Je vous laisse juger s’il vaut la peine de vous précipiter.

Mais le délai est très court pour prendre une telle décision. Il y aura des stratégies qui s’établiront après cette mesure.

MARC TISONLa Presse

Source: https://www.lapresse.ca/affaires/2024-04-28/l-impot-sur-le-gain-en-capital-pour-les-nuls.php

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