Au nouveau rôle triennal d’évaluation, qui entrera en vigueur le 1er janvier prochain, la valeur moyenne des résidences unifamiliales a grimpé de 41%, à Laval. En clair, la valeur foncière de cette catégorie d’immeubles a crû de près de 200 000$ en l’espace de trois ans. Elle est passée de 441 000 à 622 300$. Voilà ce qui ressort
Les gens qui veulent acheter une maison vivent avec une pression certaine : de crainte que les prix montent trop vite, ils sont nombreux à se lancer à la recherche de leur propriété idéale dès maintenant. Ce qui fait monter… les prix !
Le marché immobilier est poussé par l’économie, mais aussi, beaucoup, par la psychologie : la hausse des taux d’intérêt avait convaincu beaucoup de futurs propriétaires de mettre en veille leur projet. Cette semaine, la Banque du Canada a maintenu son taux directeur à 5 %. Beaucoup d’observateurs prédisent une baisse dès juin.
Il n’en fallait pas plus pour créer une poussée d’enthousiasme sur le marché immobilier, mais particulièrement chez ceux et celles qui ont moins de marge de manœuvre et qui veulent être les premiers en ligne, avant qu’une diminution du taux d’intérêt ne fasse courir les foules.
Royal LePage publie ce vendredi son Étude sur le prix des maisons et les prévisions du marché, où l’on confirme une hausse de la valeur des propriétés, ainsi que le retour des offres multiples et de la surenchère.
Deux créneaux sont particulièrement touchés, explique Marc Lefrançois, courtier immobilier agréé de Royal LePage Tendance à Montréal.
D’abord, les premiers acheteurs. Beaucoup se disent qu’avec le manque de logements et les loyers élevés, ils sont mûrs pour devenir propriétaires. Une partie de ces futurs propriétaires ont plus ou moins poursuivi leurs recherches dans les derniers mois. « Ç’a continué de relativement bien aller dans ce marché », explique Marc Lefrançois.
Sauf que le récent changement de ton dans l’immobilier grossit d’un coup le bassin de chercheurs de première maison. Tous veulent profiter des meilleurs prix possibles, ce qui mène à une surchauffe et à de multiples offres d’achat pour une propriété.
« Ça résonne beaucoup d’entendre parler d’une possible baisse des taux », confirme Damien Charbonneau, cofondateur et chef des opérations du courtier hypothécaire nesto.
Dans le prêt, les choses bougent aussi : les clients de nesto qui sont à la recherche d’une propriété sont beaucoup plus actifs, dit Damien Charbonneau. Ils sont prêts à faire une offre dès qu’ils tomberont sur la bonne propriété – ils ont passé l’étape d’évaluer leurs capacités hypothécaires. Beaucoup ont également haussé considérablement leur budget, durant les derniers mois.
Plus les gens ont confiance, plus ils vont se mettre à magasiner et faire des offres. On retombe dans un marché de surenchère et de hausse de prix.
Damien Charbonneau, cofondateur et chef des opérations du courtier hypothécaire nesto
Damien Charbonneau a un conseil pour les acheteurs, et particulièrement pour les premiers acheteurs : amorcez le processus hypothécaire en avance et obtenez une préqualification qui vous donnera l’heure juste, avant de sillonner les rues le week-end pour faire la tournée des visites libres. Selon lui, ça enlève beaucoup de stress de connaître ses capacités budgétaires d’une manière très réaliste.
Ceux qui sont déjà propriétaires
Une autre catégorie d’acheteurs est à la chasse aux aubaines actuellement : ceux qui sont déjà propriétaires et qui attendaient la fin de la hausse des taux pour acheter une propriété de valeur supérieure.
Ce marché, plus luxueux, s’était complètement arrêté en 2023, précise le courtier Marc Lefrançois.
« Avec la situation économique incertaine, il était hors de question que ces gens-là se lancent dans de grands projets », explique celui qui évalue que depuis le début de l’année, l’activité pour les propriétés de plus d’un million de dollars a bondi de 70 %, par rapport au début de 2023. « Ça nous donne une idée du changement de ton rapide », dit-il.
Les plus futés de ce groupe veulent mettre la main sur les résidences qui sont à vendre depuis un certain temps et dont le prix a baissé ces derniers mois. « Ils veulent nettoyer tous les bargains du marché », illustre Marc Lefrançois.
Ce qui aura un effet domino : si eux quittent une maison à prix moyen pour acheter plus cher, ça apportera un peu de stock dans une catégorie abordable pour un plus grand nombre de gens, explique le courtier qui rappelle que le Canada se trouve dans une sévère situation de pénurie de logements, ce qui, inévitablement, augmente le stress sur le marché. Et sur les gens.
Un rêve fragile
Le courtier n’est assurément pas le seul à faire des liens entre la pénurie de logements et les forces que cela exerce sur le marché immobilier.
Jeudi, le directeur parlementaire du budget publiait un rapport qui compare le taux d’inoccupation au Canada au nombre de couples qui se forment.
Dur constat : nous sommes en déficit. Il y a plus de couples qui se forment que de logements qui se construisent.
Le mandat du Bureau du directeur parlementaire du budget est de fournir des analyses économiques aux parlementaires d’Ottawa. Il fait cette fois une incursion dans la vie conjugale des contribuables en calculant l’évolution du nombre de ménages au pays.
« Il est utile d’évaluer la formation de ménages par rapport aux habitations nettes achevées pour jauger le déséquilibre dans les “flux” de logement. Cependant, le taux d’inoccupation total, à savoir le nombre d’unités d’habitation vacantes à vendre ou à louer par rapport au total d’unités dans le stock, offre un point de vue plus complet en termes de stock du déséquilibre dans le marché du logement », lit-on dans son rapport.
Le Canada affichait un taux d’inoccupation un peu supérieur à 5 % en 2023, un creux record qui « exerce encore plus de pression à la hausse sur les prix des maisons et sur les loyers ».
« Nos estimations démographiques fondées sur la demande indiquent que la formation de ménages a dépassé ses niveaux d’avant la pandémie pour s’établir à 460 000 (net) nouveaux ménages en 2023, beaucoup plus que le nombre net d’habitations achevées record de 242 000 unités pour la même année », souligne le Bureau du directeur parlementaire du budget.
Cette situation et les nouvelles hausses de la valeur des maisons annoncées ne sont pas sans conséquence sur le moral des gens qui veulent acheter une propriété. Certains croient même que ça ne sera plus possible – selon de récentes analyses menées par des institutions financières.
La majorité des Canadiens qui ne sont pas propriétaires croient désormais que c’est un projet inaccessible pour eux, évalue la CIBC qui publiait jeudi une étude chiffrant cette proportion à 76 %. Le rêve d’avoir une maison à soi (ou un condo) est toutefois fortement ancré pour ceux et celles qui ne sont pas propriétaires. Malgré les vents contraires, plus de la moitié (56 %) maintient son objectif d’être un jour propriétaire, calcule cette étude.
La Banque Royale s’intéressait aussi au parcours du combattant qui est maintenant celui des futurs propriétaires. Son étude sur le marché de l’habitation dévoilée plus tôt cette semaine dressait un portrait peu optimiste de la situation, pour une partie des acheteurs. Certains seront contraints de prolonger leur vie de locataire. À condition de trouver un logement.
SOURCE:La Presse
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