Par CLAIRE HERARD
ACHAT DE MAISON

L’inspection en contexte d’offres multiples.

Renoncer à l’inspection. Ou miser très haut et utiliser le rapport d’inspection pour renégocier le prix à la baisse. Quand on veut qu’une offre d’achat se distingue parmi une douzaine d’autres, les stratégies utilisées sont parfois très risquées.

« J’ai un collègue qui a reçu 21 promesses d’achat sur un petit duplex, raconte le courtier immobilier Martin Michaud. Quand des acheteurs en sont à leur troisième ou quatrième tentative infructueuse en offres multiples, ils cherchent des moyens pour que leur offre se distingue. »

Par les temps qui courent, la demande pour les maisons unifamiliales et les petits plex à Montréal est si forte qu’on ne compte plus les ventes qui se font au plus offrant, au-delà du prix de vente affiché. La compétition entre acheteurs les incite à faire un usage audacieux de la clause d’inspection, afin de rendre leur offre d’achat plus intéressante aux yeux des vendeurs.

RENONCER À L’INSPECTION

Certains acheteurs renoncent à l’inspection préachat. Pour le vendeur, cela élimine la possibilité que des vices soient découverts une fois l’offre acceptée et qu’il y ait renégociation du prix ou annulation de la vente.

 

Cette tactique peut convenir à des acheteurs qui sont entrepreneurs ou qui ont l’expérience et les connaissances pour évaluer eux-mêmes l’état d’un bâtiment en le visitant une seule fois. Pour de premiers acheteurs, ou pour n’importe quel acheteur qui a peu d’expérience en immobilier, c’est très risqué.

« Je m’inquiète pour ces jeunes acheteurs, qui vont peut-être se retrouver avec des problèmes de fondation, ou avec des réparations très coûteuses sur des murs de maçonnerie. C’est très dangereux de ne pas faire inspecter. » 

— Nathalie Clément, courtière immobilière et directrice de l’agence Via Capitale du Mont-Royal

L’inspection préachat permet de dresser un portrait complet de tous les composants visibles du bâtiment. Les acheteurs obtiennent alors une bien meilleure idée de l’état de la propriété que lors des premières visites, qui ont surtout servi à décider rapidement de présenter une offre ou non.

Cette étape est à ce point importante que les courtiers immobiliers du Québec se sont donné l’obligation de recommander l’inspection préachat à tous les clients acheteurs. Dans le formulaire de promesse d’achat de l’Organisme d’autorégulation du courtage immobilier au Québec (OACIQ), l’acheteur qui renonce à son droit de faire inspecter l’immeuble doit parapher une clause à cet effet.

« Le courtier qui suit son code de déontologie doit suggérer fortement l’inspection préachat, dit Nathalie Clément. Si le client choisit de ne pas faire d’inspection, son courtier a le devoir de lui expliquer les risques. »

ET LES VICES CACHÉS ?

L’acheteur qui va de l’avant sans inspection accepte la responsabilité de tous les vices apparents, qu’il les ait vus ou non en visitant l’immeuble : fenêtres non fonctionnelles, ventilation déficiente, humidité au sous-sol, fissures de fondation. Il est toujours préférable de transférer cette responsabilité à un inspecteur qui a l’habitude de réviser des bâtiments au complet.

« Depuis 1994, le Code civil du Québec précise que pour qu’un vice soit considéré comme apparent, il doit pouvoir être constaté par un acheteur prudent et diligent sans avoir à recourir à un expert », explique Me Françoise Roy. L’acheteur qui renonce à l’inspection préachat ne renonce donc pas du tout à son droit d’exercer un recours en vice caché, affirme l’avocate du cabinet Janson Larente Roy.

Un vice caché doit satisfaire à quatre critères : il doit exister avant la vente, être non apparent, être grave et être inconnu de l’acheteur au moment de la vente.

Les vendeurs n’ont pas avantage à préférer une offre d’achat sans condition d’inspection, croit Me Roy. En cas de recours pour vice caché, le rapport d’inspection préachat protège les vendeurs, car ce document devient une « photo » précise de leur propriété au moment de la transaction. Il peut servir à démontrer que le vice allégué était apparent.

MISER HAUT ET RENÉGOCIER

En situation d’offres multiples, certains acheteurs offrent un prix très élevé, avec la ferme intention d’utiliser le rapport de l’inspecteur pour obtenir par la suite une réduction du prix de vente de plusieurs dizaines de milliers de dollars. « Ils embauchent un inspecteur complaisant et lui disent : “Pousse un peu sur le crayon pour que je puisse renégocier après” », dit Martin Michaud, qui travaille sous l’enseigne Groupe Sutton – Immobilia.

Il existe des inspecteurs qui justifient le prix élevé de leurs services en disant à leurs clients que leur rapport les aidera à économiser sur le prix de la propriété, rapporte Martin Michaud.

Ces inspecteurs tendent à dramatiser les problèmes relevés, en déclarant que tel matériau doit être remplacé plutôt que réparé ou que plusieurs problèmes potentiels doivent faire l’objet d’expertises.

Le vendeur peut refuser de renégocier et accepter l’offre d’un autre acheteur. Parfois, le vendeur est pris de panique par l’ampleur des problèmes et il accepte une réduction de prix importante. Si la vente échoue, son courtier et lui se voient dans l’obligation de divulguer l’information contenue dans le rapport à tout futur acheteur, ce qui nuit à la valeur de la propriété.

« Toutes les propriétés ont des défauts, dit Martin Michaud. L’important, c’est de faire un achat bien informé. C’est surtout ça, le but de l’inspection préachat. »

SOURCE: LA PRESSE +

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